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Interview de

Emmanuel Arnaud

24 ans

Chargé de mission chez Novethic

 

web : www.novethic.fr

Pouvez-vous nous décrire votre métier ou emploi actuel ?
"Je suis chargé de mission chez Novethic, au sein du Département Développement Durable de la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC). J’ai deux activités principales : la première est de contribuer à la partie encyclopédique du site novethic.fr, la deuxième est d’accompagner le Département Développement Durable de la CDC dans la mise en œuvre du plan d’action visant à inscrire les activités de la CDC dans une démarche de développement durable. Plus spécifiquement, je m’occupe des problématiques d’immobilier durable, et de participation au marché européen des permis d’émission."

S'agit-il selon vous d'un nouveau métier ou d'une nouvelle façon d'exercer un métier traditionnel ? Et en quoi contribue-t-il, à vos yeux, à créer une valeur ajoutée sociale ou environnementale ?
"En ce qui concerne ma contribution au site de Novethic, la valeur ajoutée provient de la vocation de sensibilisation intrinsèque à ce site, qui est la référence française sur les thèmes du Développement Durable, de la Responsabilité Sociale des entreprises et de l’Investissement Socialement Responsable. La sensibilisation de tous est la condition pour que le développement durable ne reste pas juste un concept mais devienne une réalité.
En ce qui concerne l’accompagnement du plan d’action de la CDC, il est important de comprendre la spécificité de cette institution qui œuvre par nature pour l’intérêt général. La CDC n’a pas attendu l’émergence du concept de Développement Durable pour essayer de rendre le monde un peu meilleur, puisque c’est ce qu’elle s’efforce de faire, du moins en France, depuis 1816. Cela dit, le développement durable est une approche rajeunissante qui la pousse à mieux prendre en compte de nouveaux aspects autrefois négligés, comme le pilier environnemental ou la gouvernance. Finalement, le message que nous essayons de faire passer auprès des collaborateurs c’est que le développement durable, c’est l’intérêt général de demain : au sens où il prend en compte le futur, mais aussi au sens où ce nouveau concept pourrait être une définition moderne de ce qui fait la raison d’être de l’institution publique : l’intérêt général."

Pourquoi avez-vous choisi cet emploi ?
"Prosaïquement, je répondrai que c’est parce que c’est le métier que j’ai pu trouver dans le développement durable, et que je savais que je voulais travailler sur ce thème : il ne faut pas négliger la difficulté de trouver des offres sur ce créneau. Ensuite, à la question qui consiste à savoir pourquoi je le garde, je répondrai que le fait d’occuper une fonction aussi transversale dans un groupe aux activités aussi diversifiées est passionnant intellectuellement et permet de couvrir un grand nombre de thématiques. De plus, le fait de participer à l’élaboration du marché européen des permis d’émission est enthousiasmant : j’ai vraiment l’impression d’assister à la naissance du premier marché financer pour changer le monde ! Enfin, le fait de contribuer au site de Novethic et de participer à la diffusion de savoirsme semble essentiel pour convaincre le plus grand nombre de personnes de la pertinence de la démarche de Développement Durable - cela me force aussi à formuler en termes simples les idées ou concepts que j’utilise, ce qui fait du bien dans un domaine qui tend vite à devenir un peu trop conceptuel, voire parfois carrément fumeux…"

Quel a été votre parcours professionnel et personnel pour arriver jusqu'à ce poste ? A quand remontre votre envie de faire ce que vous faites aujourd'hui ? Y-a-t-il eu dans votre parcours un tournant décisif, une prise de conscience ?
"Je suis entré en prépa commerciale pour faire ensuite du développement dans des pays du Sud. Suite à ma prépa, j’ai intégré HEC, et il y avait un chiasme entre ce que j’apprenais en cours d’une part, et mes convictions d’autre part. Elisabeth Laville, fondatrice d’Utopies, est venue nous faire une conférence dans le cadre d’un cours animé par Tristan Lecomte (fondateur d’Alter Eco) : les concepts qu’elle nous a exposés m’ont tout de suite séduits, et me semblaient être une vraie piste pour concilier le monde des entreprises et le besoin de sens que j’avais. J’ai donc fait des pieds et des mains pour faire un stage chez Utopies en deuxième année, qui n’a fait que confirmer mon intérêt pour le Développement Durable. Après mon diplôme et un stage à la CDC sur l’Investissement Socialement Responsable, j’ai été embauché chez Novethic."

Avez-vous eu à surmonter des difficultés pour arriver à ce métier ou emploi, et si oui lesquelles ?
" Non, j’ai été très chanceux, et j’ai trouvé très rapidement cet emploi qui correspondait bien à mes attentes."

Vos études vous ont-elles bien préparé, ou non, à ce qui vous occupe aujourd'hui ?
"Une école de commerce prépare bien au monde de l’entreprise, et donne des notions de finance/comptabilité qui sont déterminantes dans la mesure où pour asseoir sa crédibilité une démarche de Développement Durable doit faire la preuve de sa rentabilité. Le fait de comprendre et de savoir manier les chiffres est très important. Par ailleurs, la maîtrise de plusieurs langues étrangères est vraiment utile dans des métiers où la notion de benchmark et de « best in class » se généralise. En revanche, j’ai été très déçu par la faiblesse de la réflexion en école de commerce sur la responsabilité des entreprises : on nous apprenait à faire des arbitrages sur le marché des devises sans même évoquer l’impact que la spéculation pouvait avoir sur les populations des pays concernés."

Dans quelle mesure votre emploi actuel fait-il écho à vos valeurs et à vos engagements personnels ?
"Mon métier fait écho à mes valeurs dans la mesure où je travaille pour une institution dont le but ultime n’est pas de faire du profit, mais d’œuvrer pour l’intérêt général, et où ma fonction est de l’aider à mieux remplir cette mission, en lui faisant prendre conscience des enjeux que le Développement Durable soulève, et en l’aidant à y apporter des réponses."

Quelles sont les plus grandes satisfactions personnelles que votre emploi actuel vous apporte au quotidien ?
"Satisfactions intellectuelles avant tout : diversité des sujets traités et complexité des problématiques. Satisfaction « morale » ensuite : j’ai l’impression que ce que je fais va dans le «bon sens », même si c’est imparfait, et souvent trop lent à mon goût."

Quels sont les défis les plus intéressants auxquels vous êtes confronté dans l’exercice de ce métier/emploi ?
"Le défi le plus intéressant est sans doute le fait de mettre en place des initiatives sur le développement durable, en comprenant la diversité des points de vue entre les différents acteurs au sein de la même institution. En effet, alors que j’arrive souvent avec des idées préconçues, du type «il faut faire ça », je découvre souvent une grande complexité au problème, des blocages culturels de « résistance au changement » mais aussi des points de vue opposés au mien mais extrêmement pertinents, qui font progresser la démarche, et font mûrir ma réflexion."

Considérez-vous que vous avez fait, ou faites encore, des « sacrifices » personnels (temps personnel/vie privée, salaire, etc.) pour ce métier/emploi ?
"Non."

Compte-tenu de votre expérience, quels conseils et/ messages d’encouragement donneriez-vous à un jeune diplômé (ou à un ami en voie de reconversion professionnelle) souhaitant trouver un métier/emploi en phase avec ses valeurs et engagements personnels ?
"Je reçois beaucoup de gens dans la situation du jeune diplômé, et mon conseil est très pragmatique : « Si vous avez vraiment envie de rentrer, il est beaucoup plus facile de rentrer par la porte que par la fenêtre ». En effet, les directions Développement Durable dans les entreprises sont très très rares, et fonctionnent le plus souvent avec quelques seniors promus en interne, et des stagiaires mal payés qui tournent. Il est donc excessivement difficile d’être recruté exactement dans ce thème, il peut donc être stratégique de rentrer dans une entreprise par une direction, les achats par exemple, et une fois que l’on est reconnu sur ce thème, essayer d’influencer le comportement de l’entreprise. Par ailleurs, le marché de l’emploi étant très compétitif sur ce thème, une ou deux expériences en stage et une formation spécialisée deviennent des passages obligés."

Et enfin : quelles sont les lectures, formations ou visites (lieux, sites web, organisations, etc.) qui vous ont personnellement inspiré(e) et que vous souhaiteriez recommander à quelqu’un voulant réconcilier travail et valeurs ?
- Le site de Novethic bien sûr(www.novethic.fr) !
- "L’entreprise verte" d’Elisabeth Laville et le site d'Utopies (www.utopies.com)
-" La génération future a t-elle un avenir ?" de Christian de Perthuis
- "L’écologie de marché" de Paul Hawken
-"La cité de la joie" de Dominique Lapierre
- "The affluent society" de Kenneth Galbraith

 

 


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