Numéro 13- Mars 2005
Notre
revue mensuelle de l'information positive sur le web…
et ailleurs
Whitepod : un camp écologique
d’un nouveau genre en plein cœur des Alpes
C’est au cœur des Alpes suisses, au-dessus
de Villars dans le Canton de Vaud, que vous trouverez
ces cinq « whitepods », des tentes en forme
de dôme, ancrées sur des plateformes en
bois autour d'un chalet d'alpage traditionnel. Ce camp,
qui se veut « écologique et high-tech »,
propose une expérience alpine et proche de la
nature, à 1 700 m d’altitude : un refuge
en version luxe et moderne qui n’accueille pas
plus de 10 personnes à la fois et n’est
accessible qu’à skis ou en raquettes. Mais
la récompense est au bout du chemin : le silence,
la neige intacte, les chaînes de montagne impressionnantes,
la puissance et le calme de la nature, loin des foules.
Whitepod est la création d’une suissesse,
Sofia de Meyer, dont l’idée initiale était
« d’offrir un havre de paix et de beauté
à ceux qui cherchent à reposer leur corps
fatigué et leur esprit stressé »,
en leur proposant de se ressourcer au contact de la
nature, en plein cœur des Alpes…Pendant la
journée, des guides de montage proposent des
expéditions à ski ou des ballades en raquettes,
et le soir on se retrouve autour d’un repas traditionnel
avant de retourner sous sa tente blanche, chauffée
par un fourneau à bois et où le lit fait
face à une immense fenêtre donnant sur
des paysages époustouflants. Les tentes sont
installées autour du chalet de Taillevent, une
ancienne étable datant de 1820, rénovée
avec des matériaux de construction locaux, et
qui abrite la salle à manger, un salon-bibliothèque,
une cheminée et les deux salles de bains.
Pour sa fondatrice, Whitepod n’est pas un nouveau
concept d’hôtel, ce n'est même pas
un hôtel du tout mais plutôt une maison
en pleine nature conçue dans un réel souci
du respect de l'environnement. Les parti-pris écologiques,
inspirés des lignes directrices de l’Organisation
Mondiale du Tourisme, vont de l’interdiction de
la motoneige (son utilisation est strictement limitée
au transport des bagages et aux urgences) aux économies
d’énergie (seul le chalet de Taillevent
a l'électricité, les tentes étant
chauffées au bois et éclairées
à la lampe à pétrole), en passant
par le mobilier en matériaux recyclés,
la literie en coton bio, le recours à des fournisseurs
et produits locaux, la mise à disposition d’une
bibliothèque sur l’environnement ou la
région, et enfin le soutien financier à
des associations écologiques locales.
Le Sommet Mondial sur l'Ecotourisme a récemment
proposé un système d'accréditation
pour reconnaître et certifier les organisations
touristiques qui adoptent avec succès une philosophie
touristique respectueuse de l’environnement. Et
Whitepod affiche fièrement sa volonté
de suivre toutes les démarches nécessaires
pour obtenir l’accréditation une fois que
le système sera établi…
Pour en savoir plus : www.whitepod.com
Considérer les
plus pauvres comme des clients… pour éradiquer
la pauvreté !
Les plus démunis représentent près
des deux tiers de la population mondiale et constituent
un gigantesque marché largement ignoré
par les entreprises. A tort, argumentent désormais
un certain nombre d’observateurs et d’associations
de développement, qui affirment au contraire
que les entreprises ont les moyens de contribuer à
la lutte contre la pauvreté, d’autant plus
qu’elles seront parmi les principaux bénéficiaires
de son éradication. En clair : répondre
aux besoins des plus pauvres peut être une source
nouvelle de profits. Selon l’économiste
C.K. Prahalad, auteur de « 4 milliards de
nouveaux consommateurs : vaincre la pauvreté
grâce au profit » , les 680 millions
de foyers du « bas de la pyramide économique
» dans les 18 plus grands pays émergents
représenteraient un marché de plus de
1,7 milliards de dollars. Aujourd’hui, le manque
d’intérêt des grandes entreprises
pour ces populations est lié à la fois
à leurs produits, qui sont inaccessibles aux
plus pauvres, mais aussi à leur marketing et
à leurs systèmes de distribution ou de
facturation qui sont inadaptés.
Pourtant, certaines expériences, dont celle de
la Grameen Bank au Bangladesh, ont montré qu’il
était possible à une entreprise de bâtir
un « business model » radicalement différent
mais viable, en plaçant au premier rang de ses
priorités la lutte contre la pauvreté
et l’établissement d’une relation
gagnant-gagnant avec les plus démunis. Dans son
sillage, le cimenter mexicain Cemex a créé
une filiale pour permettre aux pauvres des bidonvilles
d’avoir accès à des produits de
construction bon marché pour améliorer
eux-mêmes leur logement : l’entreprise commence
par inciter les communautés à épargner,
en association avec des ONG de développement,
puis leur fournit des produits moins chers et leur apprend
à s’en servir.
Sur un tout autre marché, à la demande
d’ONG comme l’UNICEF, Procter & Gamble
a développé NutriStar, une boisson en
poudre à bas prix, enrichie en micronutriments.
Ce produit répond à un besoin très
spécifique des populations défavorisées
n’ayant pas accès aux aliments contenant
naturellement des micronutriments essentiels au développement
physique et intellectuel des enfants (comme le fer,
présent dans la viande). Après un lancement
mitigé aux Philippines, NutriStar a connu un
succès certain au Venezuela et au Nicaragua,
en partenariat cette fois avec des ONG et des associations
de pédiatres (pour mener des campagnes de sensibilisation
des populations aux risques de la malnutrition) mais
aussi avec des entrepreneurs locaux (pour assurer la
distribution du produit, à travers les réseaux
locaux, jusque dans les couches les plus pauvres de
la population). D’autres expériences consistent
également, pour les entreprises, à vendre
en direct aux plus pauvres de plus petites quantités
de leurs produits, rendus ainsi plus accessibles. C’est
le cas de Holcim qui vend de petits sacs de ciment directement
aux populations des bidonvilles, en leur apprenant à
s’en servir, ou de Procter & Gamme qui connaît
un réel succès en Inde avec des sachets
unidose de shampoing à marque Pantène,
et enfin de Vodafone qui, en partenariat avec des entrepreneurs
issus des villages, crée dans les zones rurales
sud-africaines des «kiosques téléphoniques
» où les appels depuis un portable sont
facturés à l’unité…
Une approche plus innovante et durable que les traditionnels
dons des entreprises aux plus démunis. Une approche,
aussi, qui valorise les pauvres en les sortant de l’assistanat,
puisque l’entreprise les considère comme
des clients mais aussi comme des entrepreneurs ou des
partenaires. Le résultat, selon un récent
rapport duWorld Business Council on Sustainable Development,
« pourrait bien révolutionner la manière
dont les entreprises mènent leurs affaires pour
peu qu'elles acceptent de remettre en cause leur modèle
commercial traditionnel » en prenant pour
point de départ les besoins, capacités
et difficultés des populations défavorisées.
Pour en savoir plus :
- Le récent rapport du WBCSD, « Doing
business with the poor : A field guide »
(en anglais), riche en études de cas, est téléchargeable
sur www.wbcsd.ch
- « 4 milliards de nouveaux consommateurs
: vaincre la pauvreté grâce au profit »
de C.K. Prahalad, Editions Village Mondial
Garden
Project : c’est un jardin extraordinaire…
« Le jardin est un lieu riche en métaphores
: ici les prisonniers apprennent à créer
et entretenir la vie plutôt que de la menacer
et la détruire ». C’est sur
cette idée que Cathrine Sneed a créé,
en 1983, un programme de réinsertion par le jardinage
biologique. Conseillère juridique dans la prison
de San Bruno, à San Francisco, Cathrine tombe
gravement malade à 27 ans : « tout
le monde me pensait condamnée et un ami m’a
offert « les raisins de la colère »,
un livre où j’ai découvert que travailler
la terre fait renaître l’espoir. Or l’espoir
est ce qui nous manquait le plus, aux prisonniers et
à moi – c’est sûrement pour
ça que je suis tombée malade ».
Sans attendre d’être rétablie, elle
se lance dans la création d’un jardin sur
un terrain désaffecté dans la prison,
avec le soutien du Sheriff et une équipe de prisonniers
volontaires, sans autre notion de jardinage que les
souvenirs de son enfance. Au total, 4 500 prisonniers
sont passés par ce programme qui les habitue
à travailler et à avoir des horaires.
Au passage, ils recouvrent l’estime de soi et
font œuvre utile, puisque les fruits et légumes
ainsi cultivés sont donnés aux populations
pauvres des environs.
Devant ce succès, Cathrine ouvre en 1992 un second
jardin en ville : The Garden Project emploie d’anciens
détenus, et depuis peu des jeunes en difficulté,
pour renforcer la production biologique mais aussi effectuer
des travaux paysagers pour la ville - 10 000 arbres
ont ainsi été plantés en dix ans.
Pari gagné : alors que 95% des ex-détenus
de San Bruno retournent en prison dans les trois mois,
75% des jardiniers de The Garden Project n’y sont
pas retournés dans les trois ans. «Les
pouvoirs publics s’intéressent beaucoup
à ce que nous faisons, car la prévention
est rentable : cela coûte deux fois plus cher
de garder quelqu’un en prison pendant un an que
de le salarier dans ce programme » martèle
Sneed.
Pour en savoir plus :
www.gardenproject.org
Plumes Vertes : des auteurs
et des éditeurs mobilisés pour sauver
les forêts anciennes
Près de 80% des forêts primaires de la
planète ont déjà disparu, et toutes
les 2 secondes, une forêt primaire de la taille
d'un terrain de football disparaît. Les 20% de
forêts primaires restantes sont dites "forêts
anciennes" : il leur a fallu des milliers, voire
des millions d'années pour se développer
et elles n'ont jamais été soumises à
l'exploitation industrielle. Situées en Russie,
au Canada, en Amazonie, dans le bassin du Congo et le
Sud-Est asiatique, elles recouvrent près de 80%
de la diversité biologique des terres émergées
de la planète, influent sur le climat en régulant
la chute des pluies et en stockant de grandes quantités
de carbone. Elles fournissent par ailleurs des ressources
naturelles uniques et inestimables, dont la perte affecte
directement la vie de près de 90% des 1,2 milliards
de personnes vivant souvent dans une extrême pauvreté.
Lancée en octobre 2004 en France par Greenpeace,
l'initiative "Plumes vertes" consiste, pour
la première fois dans l'histoire de l'édition,
à mobiliser des auteurs et des éditeurs
qui s'opposent à l'utilisation de papier en provenance
de forêts anciennes, et demandent des alternatives
écologiques pour imprimer leurs ouvrages, telles
que le papier recyclé ou encore le papier labellisé
FSC (Forest Stewardship Council ou Conseil de bonne
Gestion Forestière). Car le secteur de l'édition
est un gros client de l'industrie papetière et
le livre utilise communément de grandes quantités
de papier issu de forêts anciennes. Cette initiative
est déjà largement soutenue dans plusieurs
pays par des auteurs célèbres comme Paolo
Coehlo, Isabel Allende ou JK Rowling, la créatrice
du personnage de Harry Potter. Au Canada, 35 éditeurs,
dont Random House et Penguin, ont formellement promis
d'arrêter d'utiliser du papier issu de forêts
anciennes.
La France, de son côté, est un des plus
grands importateurs de bois (et de produits dérivés,
tel le papier) issu de forêts anciennes en Europe.
L'initiative "Plumes vertes" y est déjà
officiellement soutenue par des écrivains comme
Claude Levi-Strauss ou Serge Tisseron... et par Graines
de Changement. De nombreuses activités sont prévues
par Greenpeace autour des différents salons du
livre et des prix littéraires pour faire connaître
l'initiative "Plumes vertes" aux professionnels
du livre et lui donner en France la même ampleur
qu’au niveau européen et international.
Pour en savoir plus : www.grainesdechangement.com/plumesvertes.htm
The Edible Schoolyard
cultive la connaissance de la nature…
The Edible Schoolyard
est un programme pédagogique unique, mené
dans le collège Martin Luther King Junior Middle
School à Berkeley (Californie). Née des
échanges entre la "star" américaine
des fourneaux Alice Waters et le proviseur de l'établissement,
en 1994, à propos du rôle de l'école
dans l'éducation à l'écologie et
à la nutrition, l'idée initiale était
de créer un potager organique au sein du collège,
complètement intégré à l'enseignement
et à son fonctionnement. Pour faire aboutir ce
projet, Alice Waters a uni ses forces avec celles du
scientifique mondialement connu Fritjof Capra (Professeur
à l'Université de Berkeley), qui venait
justement de créer the Center for Ecoliteracy,
une association militant pour l'intégration de
l'écologie à l'enseignement dès
le plus jeune âge, seule façon selon Capra
d'assurer une prise en compte de l'environnement dans
les choix des futurs citoyens. Grâce à
leurs efforts, un jardin remplaça en deux ans
l'asphalte d'un parking et une ancienne caféteria
inutilisée fût transformée en une
magnifique cuisine aménagée. Le tout,
financé par la Fondation d'Alice Waters, dont
le restaurant bio Chez Panisse (plusieurs fois élu
meilleur restaurant du pays) ne désemplit pas,
à quelques rues de là.
Une heure et demie par semaine, en petits groupes, les
enfants participent donc désormais à toutes
les activités, de la semence des graines à
la préparation des fruits et légumes récoltés
en passant par l'entretien du jardin. Au passage, des
messages pédagogiques sont ainsi dispensés
sur le lien entre la nourriture et sa provenance (la
terre), les cycles de production (de la récolte
au compost, saison après saison) ou l'importance
de protéger la nature pour nous protéger
nous-même. Du jardin à la cuisine, les
élèves apprennent les principes de l'écologie
et de l'agriculture biologique mais aussi à apprécier
la nourriture saine, les fruits et légumes frais,
le partage et l'échange, car après avoir
cuisiné, élèves et professeurs
prennent le repas ensemble. Mais The Edible Schoolyard
va plus loin en invitant tous les professeurs à
lier ce que les élèves apprennent dans
le jardin aux programmes des cours plus classiques :
on parle ainsi du commerce des graines dans les cours
d'histoire, de l'évolution des espèces
dans les cours de sciences naturelles, de l'influence
des climats et du rythme des saisons dans la production
agricole en cours de géographie, etc. Principalement
financé par des fonds privés à
ses débuts, le programme connaît un succès
tel qu'il a réussi à attirer l'attention
de l'Organisation Mondiale pour la Santé, des
autorités locales et d'un des hôpitaux
de la région, intéressé par la
prévention des troubles de la nutrition chez
les enfants (obésité, diabète,
etc). Malheureusement, la production du jardin ne permet
pas de nourrir quotidiennement les 1 000 élèves
de l'établissement, mais le projet de nouvelle
cantine (en cours de construction) comprend l'achat
de produits bio à des agriculteurs locaux, le
recrutement d'un chef et la formation à la cuisine
des équipes qui se contentaient jusque-là,
comme ailleurs, de réchauffer des plats préparés.
Quant à la municipalité, elle a décidé
récemment de généraliser l'expérience
à l'ensemble des écoles de Berkeley d'ici
à 10 ans.
Pour en savoir plus :
Le site du projet : www.edibleschoolyard.org
Le site du programme "Rethinking school lunch"
mené par The Center for Ecoliteracy pour généraliser
l'expérience de The Edible Schoolyard : www.ecoliteracy.org/rethinking/rsl.html
Le portrait
d'Alice Waters écrit par Graines
de Changement dans le quotidien Métro
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