NewsletterCitations inspirantes


Portrait de

Jean Delour

33 ans

Direction des Organismes Sociaux d'Intérêt Général au Crédit Coopératif

 

web : www.credit-cooperatif.coop

"On peut dire que mes études ne me prédestinaient pas à la finance. À la sortie de ma thèse de physique à l'Ecole Normale Supérieure, j'ai eu le sentiment que la recherche était un monde passionnant mais un peu à part ; j'ai voulu basculer dans la "vraie vie". Je me suis alors tourné vers la finance et j’ai travaillé 2 ans et demi dans une salle des marchés chez BNP Paribas. Aux antipodes de ce que je fais aujourd'hui ! Je ne maîtrisais ni l'amont, ni l'aval : je travaillais pour un actionnaire que je ne connaissais pas et j'injectais des sommes importantes sur les marchés sans chercher à connaître la réalité des entreprises qui se cachaient derrière les courbes. Loin d'être la "vraie vie", cela ressemblait plutôt à un grand jeu vidéo. J'ai donc poursuivi mes recherches pour trouver un métier plus en phase avec la réalité. Je suis allé voir du côté d’associations et ONG sans vraiment trouver mon bonheur, puis en tâtonnant, j'ai trouvé ce poste au Crédit Coopératif, à mi-chemin entre ces deux mondes.

Le Crédit Coopératif est une banque du groupe Banque Populaire depuis 2003. C'est une banque de l'économie sociale, un secteur qui regroupe les coopératives, associations, mutuelles … toutes les structures dont les gouvernants sont élus par les clients et dans lesquelles la distribution des bénéfices aux actionnaires est très limitée. Nos clients sont à la fois des entreprises, des organismes sociaux et des particuliers. Au sein de la banque, j’appartiens à un petit groupe de personnes dont le rôle est d’agir transversalement avec tous les services concernés pour positionner le Crédit Coopératif au cœur des circuits de la finance solidaire. Concrètement, cela consiste à collecter de l'épargne militante pour l’investir dans des structures de l’économie solidaire qui ont des missions d'intérêt général et une vocation sociale (la réinsertion, le logement très social, le commerce équitable, etc). Dans le secteur de l'économie solidaire, la plupart des capitaux sont investis dans un petit nombre de structures dont la taille et la solidité financière rassurent les investisseurs Notre mission est de faciliter l'accès aux fonds d'épargne solidaire à des structures plus petites, notamment en les aidant à se regrouper. C'est l'exemple de "Finantoit", le premier outil privé d’investissement solidaire dans le secteur du logement très social, créé en juillet 2006 par cinq partenaires associatifs, et qui mobilise des ressources issues de l’épargne solidaire pour le financement du logement très social. L’objectif est de contribuer au financement de 400 logements par an d’ici 5 ans. Les projets sélectionnés devront intégrer des objectifs de faible coût d’usage et tout particulièrement de faible consommation énergétique.

Au fond, mon travail consiste à prouver qu'il y a une alternative au modèle capitaliste pur, qu'il existe des structures puissantes qui font changer les choses et dans lesquelles ce n'est pas le capital qui dirige, où les bénéfices ne servent pas seulement à rémunérer les actionnaires mais son aussi en grande partie réinvestis dans l'ingénierie. L'autre aspect est que nous contribuons à raccourcir le chemin entre ceux qui ont de l'argent (qui veulent donner du sens à leurs investissement et savoir ce que la banque fait avec leur épargne) et ceux qui n'en ont pas mais sont investis pour changer les choses. Nous remettons de la transparence dans le circuit.

Ce qui est le plus satisfaisant dans mon métier c'est de voir concrètement l'impact de nos actions, en apportant des petites sommes à des gens qui en ont vraiment besoin plutôt que de manipuler des gros montants sans savoir comment ils sont utilisés. En termes de salaire, les rémunérations dans les salles de marché sont tellement démesurées que ce que je gagne aujourd'hui représente plutôt un retour à la vie normale. S'il y a une chose que mes études m'ont apprise c'est de rester libre et ne pas me laisser enfermer dans des choses qui, au fond, ne me conviennent pas."

Mes messages-clefs
"Le plus important est d'être en accord avec le fond de ce que l'on fait. Il y a plein de métiers qui sont nécessaires et il ne faut pas forcément travailler dans l'ISR ou le développement durable mais commencer par se poser la question de la finalité de son métier puis de le mettre en cohérence avec ce que l'on recherche."

 

 


© Graines de Changement, Septembre 2007 - Tous droits de reproduction et de diffusion réservés